Malgré la pandémie, la consommation de substances chez les jeunes adultes canadiens reste stable

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Une équipe du CRCHUM publie la première étude longitudinale sur l’utilisation d’alcool, de cannabis et de nicotine chez les 24-33 ans avant et pendant la pandémie.

Reportages montrant des files interminables devant les succursales de la Société des alcools du Québec et de la Société québécoise du cannabis, témoignages de personnes en télétravail inquiètes pour leur santé mentale, jeunes parents en perte de repères, etc.

Depuis deux ans, les médias contribuent à véhiculer l’idée qu’isolement social, difficultés financières et détresse psychologique causent, en temps de pandémie, une augmentation de la consommation de substances psychoactives, dont l’alcool, le cannabis et la nicotine (cigarettes classiques et électroniques). Est-ce vraiment le cas?

Dans une étude dont les résultats sont parus dans la revue The Lancet Regional Health ‒ Americas, Marie-Pierre Sylvestre et Jennifer O’Loughlin, chercheuses au Centre de recherche du CHUM (CRCHUM), se sont intéressées aux différences dans la fréquence d’utilisation de ces substances chez les jeunes adultes, groupe considéré par la littérature scientifique récente comme le plus touché par l’anxiété et par la détresse psychologique.

Jusqu’ici, aucune étude n’avait permis de collecter de telles données, encore moins dans la population canadienne.

«En général, la consommation hebdomadaire ou quotidienne de substances psychoactives a été plutôt stable dans notre échantillon de jeunes adultes canadiens. Loin des discours alarmants de certains médias, nos résultats ne montrent pas que la consommation d’alcool, de nicotine ou de cannabis a augmenté de façon spectaculaire pendant la pandémie», dit Marie-Pierre Sylvestre, première auteure de l’étude et professeure au Département de médecine sociale et préventive de l’Université de Montréal.

Une cohorte de longue date

La chercheuse a pu mettre à profit la cohorte NDIT ‒ The Nicotine Dependence in Teens ‒, constituée entre 1999 et 2000 par sa collègue Jennifer O’Loughlin, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en déterminants précoces des maladies chroniques de 2004 à 2021.

Au total, 1294 jeunes, recrutés à l’âge de 12-13 ans (1999-2000) dans 10 écoles secondaires de la région de Montréal, composent l’échantillon de jeunes adultes étudiés.

Les données prépandémiques sur la consommation de cannabis, d’alcool, de cigarettes classiques et électroniques et sur l’hyperalcoolisation rapide ont été collectées alors que les sujets avaient 20, 24 et 30 ans environ. Durant l’épidémie, les données ont été recueillies de décembre 2020 à juin 2021 (âge des participants: 33 ans).

Des effets à géométrie variable: vraiment?

«Dans notre étude, nous avons pu observer que les personnes ayant un plus faible niveau d’études [cinquième secondaire] et les adultes vivant seuls étaient plus susceptibles de commencer à consommer des substances psychoactives pendant la pandémie ou d’en augmenter leur consommation», explique Marie-Pierre Sylvestre.

«Nous pouvons raisonnablement penser que ces groupes plus vulnérables pourraient avoir besoin d’attention et d’interventions plus ciblées pour faire face aux effets de la pandémie.»

Avant de tirer des conclusions trop hâtives, les deux chercheuses invitent leurs collègues scientifiques à étendre le suivi de leurs cohortes actuelles afin de collecter des données représentatives d’une panoplie plus large de tranches d’âge et de sous-groupes vulnérables.

Cela permettrait entre autres de déterminer si les changements dans la consommation de substances psychoactives pendant la pandémie de COVID-19 se traduisent par des changements dans l’utilisation des services de santé ou la mortalité.

Cette étude est la première d’une série de trois financée par les Instituts de recherche en santé du Canada. Les deux prochaines seront publiées prochainement et aborderont les thèmes de la santé mentale et de l’activité physique.

À propos de l’étude

L’article «A longitudinal study of change in substance use from before to during the COVID-19 pandemic in young adults», par Marie-Pierre Sylvestre, Jennifer O’Loughlin et leurs collègues, a été publié le 6 janvier 2022 dans la revue The Lancet Regional Health ‒ Americas.

Le financement de l’étude a été assuré par la Société canadienne du cancer et les Instituts de recherche en santé du Canada.

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