Passionnée d’immunologie, Petronela Ancuta a réalisé un rêve en devenant directrice du laboratoire Migration cellulaire et pathogenèse du VIH au CRCHUM en 2006. Principale investigatrice du Consortium canadien de recherche sur la guérison du VIH (CanCURE) des IRSC depuis 2014, elle vise à approfondir les connaissances scientifiques de ce virus pour améliorer la qualité de vie des personnes qui en sont atteintes
En effet, même si le VIH peut maintenant être contrôlé par la thérapie antirétrovirale, sa persistance dans l’organisme des personnes infectées continue à entraîner une inflammation chronique, qui occasionne plusieurs de problèmes de santé, comme la neurodégénérescence, des maladies cardiovasculaires et l’ostéoporose.
Identifier les molécules en cause
Mme Ancuta et son équipe ont réussi il y a quelques années à mettre en lumière le rôle des lymphocytes TH17, principalement situés dans l’intestin, dans la persistance virale chez les personnes vivant avec le VIH et recevant une thérapie antirétrovirale.
Après avoir démontré que les cellules TH17 étaient très permissives au VIH, la chercheuse s’est penchée sur les facteurs qui favorisent leur infection. Son laboratoire a alors découvert qu’une molécule facilite la réplication du virus : la protéine RORC2, pour laquelle il existe déjà des inhibiteurs, mis au point dans le but de soigner des maladies auto-immunes. De plus, son équipe a prouvé que le récepteur d’aryl hydrocarbone (AhR) joue un rôle crucial dans la latence du virus, ouvrant la voie à de nouvelles stratégies thérapeutiques.
À la suite de ces avancées majeures, et en partenariat avec les équipes du Dr Elie Haddad, clinicien-chercheur au Centre de recherche du CHU Sainte-Justine, et d’Éric Cohen, chercheur à l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM) et directeur de CanCURE, Petronela Ancuta réalise une étude préclinique sur des souris humanisées, c’est-à-dire qui comportent des tissus humains et sont porteuses du VIH, pour tester l’efficacité antivirale des inhibiteurs de RORC2.
Le cycle circadien sous la loupe
En étudiant comment contrecarrer le VIH, l’équipe de la chercheuse a aussi constaté que les cellules TH17 comportaient des molécules surexprimées intervenant dans la régulation de l’horloge immunitaire. « Les activités corporelles sont régies par une horloge centrale et des horloges périphériques, et le système immunitaire a aussi une activité rythmique, alors on trouve des cellules différentes dans le sang selon l’heure de la journée. C’est ce qu’on appelle la chrono-immunologie », explique Mme Ancuta.
Il semble qu’une dérégulation de cette horloge aurait une incidence négative chez les personnes infectées par le VIH. Grâce à un financement des IRSC, son laboratoire a donc entamé une étude pour évaluer la présence de certaines cellules immunitaires dans le sang de personnes infectées tout au long de la journée.
Des collaborations essentielles
Dans le cadre de ses projets sur les mécanismes d’immunité cellulaire, le laboratoire de Petronela Ancuta utilise la plateforme de cytométrie en flux, située à l’intérieur d’un laboratoire de confinement de niveau 3. Ces équipements de pointe serviront entre autres à l’étude des cellules fœtales provenant du placenta de personnes vivant avec le VIH afin de comprendre son impact sur les enfants, même s’ils ne sont pas infectés par le VIH en raison du traitement antirétroviral.
« J’ai eu la chance de rencontrer des gens remarquables qui vivent avec le virus et de comprendre comment la maladie affecte leur quotidien. Ces personnes sont souvent stigmatisées et isolées, même au Canada, et j’espère faire une différence dans leur vie », conclut la chercheuse.