En juillet 2023, la Dre Amal Abdel Baki recevait le prix Angelo Cocchi lors de la 14e conférence internationale sur l’intervention précoce en santé mentale (IEPA), qui avait lieu à Lausanne, en Suisse. Cette reconnaissance souligne ses contributions dans l’implantation de l’intervention précoce pour les premiers épisodes psychotiques, un de ses principaux intérêts de recherche.
En effet, dès le début de son parcours de chercheuse en psychiatrie, il y a près de 20 ans, elle s’intéresse aux jeunes vivant avec un trouble mental sévère, comme la schizophrénie ou la maladie bipolaire, ainsi qu’à l’impact de ces maladies sur leur fonctionnement. « Ces personnes arrivent à une période charnière où ils doivent prendre des décisions de vie importantes, sur lesquelles la maladie peut influer, alors il importe de leur offrir les meilleurs traitements au moment opportun », explique-t-elle.
L’influence des facteurs sociaux
Au cours de la dernière année, la Dre Abdel-Baki et son équipe ont préparé une publication sur l’impact de la consommation de cannabis chez les jeunes sur l’évolution de leur maladie et sur leur capacité à fonctionner.
« Ce n’est qu’un exemple, mais nous nous penchons sur plusieurs déterminants sociaux de la santé. Comment le contexte dans lequel vivent les jeunes – par exemple, le fait d’être un immigrant, une personne racisée ou une femme, ou d’avoir vécu des expériences traumatiques durant l’enfance – influence-t-il l’évolution de la maladie et leurs chances de rétablissement? », précise-t-elle.
Un modèle adapté au Québec
Dans cette optique, la Dre Abdel-Baki a poursuivi ses travaux démarrés en 2019 sur l’implantation du SARPEP (Système apprenant rapide pour les programmes pour premiers épisodes psychotiques), destiné aux intervenants des programmes spécialisés en intervention précoce pour les premiers épisodes psychotiques (PPEP). Son objectif? Améliorer la qualité des soins dans le cadre des PPEP du Québec, une priorité pour le ministère de la Santé et des Services sociaux.
Comment? En détectant la maladie et en intervenant efficacement le plus tôt possible pour éviter la détérioration de la santé mentale et du fonctionnement social, familial et professionnel des jeunes patientes et patients.
« L’efficacité de ce modèle a été démontrée dans plusieurs études et méta-analyses partout dans le monde, alors l’enjeu consiste surtout à l’intégrer à large échelle au modèle québécois. Le SARPEP est en fait une communauté de pratique, regroupant des chercheurs, des cliniciens, des gestionnaires, des décideurs politiques, des patients et leurs familles qui déterminent ensemble comment améliorer les pratiques »
— Dre Amal Abdel Baki
Un rayonnement provincial… et au-delà!
Le SARPEP étant maintenant déployé dans 20 sites représentatifs de diverses réalités des milieux de pratique, la chercheuse et ses collaborateurs collectent des données, fournissent de la rétroaction aux équipes, puis offrent des activités de renforcement aux équipes pour maximiser l’efficacité des interventions des professionnels de la santé. Par exemple, la perspective des patients est mesurée à l’aide d’un questionnaire abordant neuf dimensions de l’évolution de leur rétablissement, comme la satisfaction quant à leur santé physique et mentale, leur autonomie en hébergement et leur capacité à mener des études ou un travail.
« Ma recherche et ma pratique clinique avec mon équipe de professionnels de la santé se sont toujours nourries l’une et l’autre, et je pense que cela nous permet d’avoir un impact réel sur les patientes et les patients », se réjouit la Dre Abdel-Baki.
L’objectif est maintenant d’étendre le SARPEP à toutes les PPEP du Québec d’ici deux ans. Parallèlement, la Dre Abdel-Baki et ses collègues chercheurs ont organisé au CRCHUM un événement pancanadien afin d’explorer comment le système apprenant pourrait être adapté aux autres provinces.